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Rome, il voit venir vers lui un grand faiseur de miracles, arrivé de l’Extrême-Orient et enveloppé d’un épais nuage d’étranges aventures et de récits bizarres. Celui-ci, d’après les rumeurs entretenues parmi les néo-bouddhistes, avait une origine divine : il était le fils du dieu du soleil, Sourya, et de quelque nymphe d’un fleuve.

Le faiseur de miracles s’appelait Apollonius. C’était incontestablement un homme de génie. Il était moitié Asiatique, moitié Européen, évêque catholique in partibus infidelium. En lui s’unissaient merveilleusement la possession des conclusions les plus récentes et des applications techniques de la science occidentale, et la connaissance théorique et pratique de tout ce qui est vraiment solide et important dans le mysticisme traditionnel oriental. Extraordinaires, les résultats d’une telle combinaison.

Parmi eux se trouve même l’art, demi-scientifique, demi-magique, d’attirer et de conduire à sa guise l’électricité de l’atmosphère ; et dans la foule on dit qu’il fait descendre le feu du ciel. D’ailleurs, frappant l’imagination populaire par divers prodiges inouïs, il n’abuse pas encore de sa puissance dans des intentions particulières. Donc, cet homme vient vers le grand empereur, le salue en lui donnant le titre de véritable fils de Dieu, lui déclare avoir vu dans les livres secrets de l’Orient des prédictions qui le désignent directement en qualité d’empereur, de dernier sauveur qui jugera l’univers ; enfin, il met à son service sa personne et tout son art. Ravi, l’empereur l’accueille comme un présent d’en haut, lui confère