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vingt-cinq ans entre ; on lui refuse les applaudissements habituels. Cependant tous les yeux se sont fixés sur lui ; et déjà son visage, son regard imposent le respect. Quelques meneurs, parmi les philologues, essayent de lancer le tumulte ; ils ne sont pas suivis. L’auditoire entier a été saisi par ce jeune homme qui lui parle de l’idéal chrétien, de la grandeur humaine et de l’amour divin pour elle. La grande voix, profonde et souple, du professeur retentit dans un silence religieux ; elle rend hommage au Christ, elle le désigne comme le seul principe qui puisse instaurer le règne de l’amour et d’une vraie fraternité ; elle convie tous les auditeurs à se laisser diviniser par Lui. Et, soudain, les applaudissements éclatent, unanimes : juristes, philologues, naturalistes, acclament celui qu’ils devaient honnir ; ils se presseront désormais à toutes ses leçons, ils l’applaudiront jusqu’au bout. »

Et pourtant, dans le cours des six années où il figura parmi les professeurs officiels, il ne put occuper sa chaire que treize ou quatorze mois au total. C’était l’administration qui lui interdisait la parole ; une première fois, provisoirement ; d’une manière définitive, en mars 1881.