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élevés, plutôt qu’elles ne ressemblent à une rixe entre deux ouvriers ivres. Mais ceci n’est qu’un degré intermédiaire. Remarquez que chez les peuples avancés le duel cesse d’être en usage. Tandis que la Russie retardataire a à pleurer ses deux meilleurs poètes, qui ont péri en duel, dans la France cultivée le duel n’est plus guère qu’un sacrifice non sanglant à une laide et défunte tradition. Quand on est mort, c’est qu’on n’est plus en vie[1], dirait M. de La Palisse. Certainement, vous et moi nous verrons le duel pour toujours enseveli dans les archives de l’histoire. À cet égard, un compromis ne peut être durable. La vraie culture exige la complète disparition des rixes entre individus et entre peuples. Quoi qu’il en soit, la politique pacifique est la mesure et le symptôme du progrès civilisateur. Aussi, malgré tout mon désir de plaire à notre très honorable Général, je maintiens quand même ma déclaration : que la propagande par écrits contre la guerre est un indice très consolant. Non seulement, cette propagande devance, mais encore elle hâte la solution définitive d’un problème qui a mûri. Avec toutes ses singularités et tous ses entraînements, elle est importante, par ce fait qu’elle accentue, dans la conscience générale, le trait essentiel, pour ainsi dire magistral, du progrès historique. L’arrangement pacifique, c’est-à-dire courtois, c’est-à-dire pour tous avantageux, de tous les rapports et de tous les conflits internationaux – telle est l’inébranlable règle de la saine politique dans l’humanité civilisée. –

  1. En français. (N. d. t.)