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et l’écriture, qui n’absorbent pas la formation intellectuelle, mais qui en sont la condition indispensable. La politesse est la culture à l’usage de tout le monde[1]. Nous voyons en effet qu’elle déborde les relations particulières entre gens d’une classe pour s’étendre aux relations sociales entre les différentes classes – et aux rapports politiques, ou internationaux. Nous nous rappelons encore comment, du temps de notre enfance, les gens de notre classe pouvaient être impolis avec les roturiers ; mais, maintenant, la politesse obligatoire et même coercitive a enjambé ces frontières des castes ; et la voici prête à enjamber les frontières internationales.

LA DAME. – Veuillez abréger. Donc, vous nous conduisez à cette conclusion : que la politique pacifique entre les États est la même chose que la politesse entre les individus.

L’HOMME POLITIQUE. – Assurément, ce n’est pas pour rien qu’en français politesse[2] et politique[3] ont une parenté très étroite. Et remarquez que pour cela on ne fait appel à aucun sentiment, on n’exige rien de cette bienveillance que le Général a invoquée sans raison. Parce que je m’abstiens de me jeter sur tel ou tel individu et de lui déchirer la figure avec les dents, cela ne signifie pas que je ressente aucune bienveillance pour lui. Je puis, au contraire, nourrir dans mon âme les plus mauvais sentiments à son égard ; mais une telle querelle me répugne à moi, homme cultivé.

  1. En français. (N. d. t.)
  2. En français. (N. d. t.)
  3. En français. (N. d. t.)