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faites, les guerres d’autrefois ; moi, je demande, comme le Prince, mais avec une autre intention : quelle devra être notre altitude, si, dans une région quelconque, les massacres se renouvellent ?

L’HOMME POLITIQUE. – Avant qu’ils aient recommencé, nous avons pour devoir actuel et urgent de devenir raisonnables, et d’adopter une bonne politique, fût-elle allemande, à la place de la mauvaise politique que nous avons pratiquée. Ayons soin de ne pas irriter les Turcs en parlant d’arborer des croix sur des mosquées ; abstenons-nous de crier comme des gens ivres ; mais, tout doucement et amicalement, civilisons la Turquie pour un profit réciproque, le nôtre et le sien. De nous dépend directement le soin de faire vite comprendre aux Turcs que massacrer la population de leur pays c’est, non seulement une action mauvaise, mais, chose capitale, une action qui n’est d’aucune nécessité et qui ne sert absolument à rien.

M. Z… – Mais dans des éclaircissements de ce genre, liés à des concessions de chemins de fer et à toute espèce d’entreprises commerciales et industrielles, les Allemands, bien sûr, nous devanceront[1] ; et il n’y a pas à espérer que, là-bas, nous puissions rivaliser avec eux.

L’HOMME POLITIQUE. – Mais pour quel motif devrions-nous rivaliser ? Si, à ma place, quelque autre personne

  1. Ces mots, écrits par moi en octobre 1899, se sont trouvés, un mois plus tard, justifiés par la convention germano-turque relative aux affaires de l’Asie Mineure et du chemin de fer de Bagdad. (Note de l’auteur.)