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ses possessions d’Asie, la politique anglaise, les circonstances ayant changé, devint hostile aux Turcs et favorable aux Arméniens. On vit en Arménie des agitateurs anglais, de même que jadis on avait vu en Bulgarie des agitateurs slavophiles. Alors, les « démons » bien connus du Général se montrèrent, suivant la formule, les hommes de la situation et, selon le sens très positif de l’expression, ils mangèrent la plus large portion de chair chrétienne, chaque fois qu’il leur en tombait sous la dent.

LE GÉNÉRAL. – Impossible d’écouter de pareilles choses ! Dans le cas dont nous parlons, quelle est donc la guerre qui mérite d’être incriminée ? Au moins, ayez la crainte de Dieu. Si, en 1878, les hommes d’État avaient fait leur devoir aussi bien que les hommes de guerre, aucun renforcement et aucune organisation des troupes irrégulières en Arménie n’auraient pu avoir lieu, ni, par conséquent, aucun des massacres que je viens de rappeler.

L’HOMME POLITIQUE. – Est-ce à dire que vous admettez la définitive destruction de l’empire turc ?

LE GÉNÉRAL. – Oui. Quoique j’estime et j’aime les Turcs de tout mon cœur, comme un peuple très beau, surtout quand je le compare aux Éthiopiens de différentes couleurs, néanmoins, je pense que, depuis longtemps, l’heure a sonné d’en finir avec l’empire turc.

L’HOMME POLITIQUE. – Je ne pourrais rien vous objecter, si, à sa place, ceux que vous appelez les Éthiopiens étaient capables de s’organiser en une espèce d’empire. Mais, en fait, ils ne savent que se