Page:Soloviev - Trois entretiens sur la guerre, la morale et la religion, trad Tavernier, 1916.djvu/163

Cette page n’a pas encore été corrigée

toi, ne le regrette jamais. Si le péché est un mal, c’est un mal de s’en souvenir, ce qui équivaut à avoir de la rancune, et ce que personne n’approuve. Il n’y a rien de pire que d’avoir de la rancune, c’est-à-dire de se rappeler ses péchés. Mieux vaut pour toi te souvenir du mal que les autres te font. C’est un procédé avantageux ; car ainsi tu seras sur tes gardes. Le mal que tu fais, oublie d’y penser, afin qu’il n’en reste rien. Il n’y a qu’un seul péché mortel : la tristesse, parce qu’elle engendre le désespoir. Le désespoir n’est pas à proprement parler un péché, mais c’est la mort spirituelle elle-même. Ensuite, qu’y a-t-il encore en fait d’autres péchés ? L’ivrognerie ? Qu’est-ce que c’est ? Un homme raisonnable boit en proportion de ce qu’il peut absorber ; il ne boit pas au-delà de sa capacité ; mais un fou s’enivre avec de l’eau de source, et cela prouve que la violence n’est pas dans le vin mais dans la folie. D’antres, par folie, se brûlent avec de l’eau-de-vie, et se noircissent non pas seulement à l’intérieur mais aussi au dehors ; et ils projettent de petites flammes – je l’ai constaté de mes propres yeux. On ne sait plus de quel péché accuser l’homme de qui sortent les flammes de la Géhenne. En ce qui concerne les diverses infractions au septième commandement, je dis, la main sur la conscience : il est difficile de juger, mais absolument impossible de louer. Bien entendu, je ne recommande pas. Certainement c’est un plaisir pénétrant, mais, en fin de compte, il produit la tristesse et il abrège la vie. Si tu ne me crois pas, regarde au moins ce qu’a écrit là-dessus un savant docteur allemand. – Et Varsonophii tira d’un rayon