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DEUXIÈME ENTRETIEN


Audiatur et altera pars.


Le jour suivant, à l’heure convenue, le thé de la fin de l’après-midi, je me trouvai sous les palmiers avec les autres personnes. Seul le Prince manquait. Nous avions à l’attendre. Comme je ne joue pas aux cartes, j’employai la soirée à résumer tout ce deuxième entretien, depuis le commencement. Cette fois, l’Homme politique parla beaucoup et en phrases tissées d’une manière si étendue et si complexe que tout rapporter avec une exactitude littérale était chose impossible. Je dus me borner à reproduire une suffisante quantité de ses propres sentences, en m’efforçant de leur laisser leur ton général ; mais, naturellement, pour exposer la substance de son discours, il m’a fallu souvent me servir de mon propre vocabulaire.


L’HOMME POLITIQUE. – Depuis longtemps, j’ai remarqué une chose bizarre : les gens qui ont la marotte d’une espèce de morale supérieure n’arrivent jamais à posséder la plus simple et la plus nécessaire vertu et même, suivant moi, l’unique vertu nécessaire, c’est-à-dire la politesse. Aussi, avons-nous lieu de remercier le Créateur de ce qu’il y a, relativement, si peu de personnes attachées à cette idée de morale supérieure – je dis idée, parce que je n’en ai jamais rencontré la réalité et parce que je n’ai aucune raison de croire à l’existence d’une chose pareille.

LA DAME. – Ce n’est pas nouveau. Mais ce que vous dites de la politesse est vrai. En attendant que