Page:Soloviev - Trois entretiens sur la guerre, la morale et la religion, trad Tavernier, 1916.djvu/143

Cette page n’a pas encore été corrigée

bien que vous êtes capables de les disperser : quelle douceur vous en reviendra ? Dieu m’ordonne, non pas de les mettre en fuite, mais de les exterminer.

À deux chefs de sotnias je donnai l’ordre d’attaquer en ordre dispersé, de tirer sur les démons et, ensuite, ayant engagé l’affaire, de reculer vers l’artillerie, qui était dissimulée par la dernière sotnia. J’échelonnai les dragons de Nijni-Novgorod à gauche de la batterie. Je tremblais d’impatience. Il me semblait avoir toujours devant moi le petit garçon grillé, avec ses yeux hors de l’orbite. Et pendant ce temps-là, mes cosaques tombaient. Ô Seigneur !

LA DAME. – Comment se termina l’affaire ?

LE GÉNÉRAL. – Elle se termina de la meilleure façon, sans un faux mouvement. Les cosaques ouvrirent la fusillade, puis reculèrent vers l’artillerie, tout en criant à leurs chevaux. Derrière eux accourait la race maudite surexcitée, ayant déjà cessé de tirer et galopant en foule droit sur nous. Les cosaques s’éloignèrent à deux cents sagènes, s’éparpillant comme des pois. Alors, je vis que c’était l’heure de Dieu. À la sotnia qui masquait les canons je donnai l’ordre de rompre. Mon escorte se divise en deux parties, à droite et à gauche. Tout est prêt. Bénissez-nous, Seigneur ! Je commandai aux canonniers de faire feu.

Et le Seigneur bénit mes six décharges. Je n’avais jamais entendu un tel glapissement diabolique. Avant d’avoir pu se remettre en ordre, les démons recevaient une deuxième volée de mitraille. Toute la bande recula. Troisième décharge ; et à la poursuite. C’était un tourbillon, comme en produisent des allumettes