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mémoires détaillés et instructifs : l’histoire nationale et l’histoire universelle.

LE PRINCE. – Mais ces mémoires ne peuvent plus nous enseigner ce que nous devons être maintenant ni ce que nous devons faire maintenant. Que Vladimir Monomach ait vraiment existé et pas seulement dans l’imagination de quelque moine, Laurent ou Ypathe ; que même il ait été le meilleur homme du monde et qu’il ait plaint les manants avec sincérité ; en pareille circonstance, il eut raison de guerroyer contre les Polovtsi, puisque, à cette époque sauvage, la conscience morale ne s’élevait pas au-dessus de la grossière et byzantine compréhension du christianisme et permettait de tuer pour l’amour de ce qui semblait être le bien. Mais comment agirions-nous ainsi, depuis que nous avons compris que le meurtre est le mal contraire à la volonté divine, interdit de toute antiquité par le précepte divin ? De même, cela ne peut nous être permis en aucune manière, sous n’importe quel nom, et ne petit cesser d’être le mal, quand, au lieu d’un homme, on tue, sous la dénomination de guerre, des milliers d’hommes. C’est, avant tout, la question de la conscience personnelle.

LE GÉNÉRAL. – Eh bien ! puisque c’est affaire de conscience personnelle, permettez-moi de vous soumettre l’exposé que voici. Au point de vue du sens moral, comme aux autres, naturellement, je suis un homme de valeur moyenne, ni noir, ni blanc, mais gris. Je n’ai manifesté ni vertu particulière ni particulière perversité. Les bonnes actions comportent toujours quelque point difficile à élucider. En aucune