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d’une minceur extrêmes, le port droit, l’attitude recueillie, il donnait tout d’abord l’impression d’un personnage qui n’aurait eu qu’une demi-réalité physique. Mais, sous la longue chevelure grisonnante qui encadrait son front large et harmonieux, s’épanouissait rapidement une puissance pénétrante. Ses yeux de myope, immenses et magnifiques, projetaient des rayons. La voix, étendue et pleine, était singulièrement nuancée. Gutturales, éclatantes, douces et même caressantes, toutes les notes se succédaient ; ou bien elles composaient un seul accord, ainsi que dans les cloches d’un métal artistique et savant où les sonorités les plus graves sont traversées de vibrations argentines. Des manières humbles et presque timides, avec un profond accent d’énergie audacieuse et obstinée. Tel apparaissait Vladimir Soloviev.

Que venait-il nous dire ? et quel intérêt spécial pouvait présenter cette idée russe ? Avait-elle donc plus d’importance ou plus de précision que l’idée française, anglaise, allemande ou italienne ? Le discours, bien qu’il ne fût pas long, produisit une impression de puissance. Bientôt l’auditoire s’était rendu compte que le conférencier interprétait des sentiments qui touchaient