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LA CORVÉE

saient. Il pourrait dorénavant avec ses cinq fils et ses quatre filles venir s’agenouiller sur la tombe embellie de sa défunte femme ; il pourrait se relever moins triste puisqu’il aurait contribué à faire renaître l’ordre dans le champ du suprême repos ; il aurait fait une œuvre dans sa vie, ce qui lui vaudrait bon accueil de la part du grand Christ du cimetière lorsque lui-même viendrait à son tour dormir le dernier sommeil.

Cette corvée, comme il la souhaitait générale, fructueuse, à jamais mémorable, il se chargea de l’organiser. Il fallait le voir au sortir de l’église au milieu des groupes qui font la chronique de la semaine : un mot à celui-ci, un coup de coude à celui-là. Bref, il vit tout le monde ; il parla à tout le monde ; il invita tout le monde. Il ne recueillit que des approbations. Restait à constater si la réalité répondrait à son attente.

* * *

Le trois novembre était arrivé. Une longue théorie de voitures cheminaient lentement vers le cimetière tandis que de nombreux manœuvres, la pelle ou la pioche sur l’épaule, attendaient le signal pour commencer la besogne. Le père Michel Desbiens, la figure épanouie, assignait à chacun le labeur de la journée.