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jurandes, maîtrises et autres institutions de ce genre qui tendent à déshériter la plus grande partie de la classe indigente du seul patrimoine qu’elle ait reçu de la nature ; lorsqu’il arme et solde des troupes de commis sur les frontières pour empêcher ses sujets de consommer ce qui leur paraît plus agréable, plus commode et moins coûteux, et pour empêcher les producteurs de disposer de leur légitime propriété au prix le plus avantageux : déraisonnable, lorsqu’il diminue le nombre des travailleurs et resserre le développement de l’industrie ; lorsqu’en écartant par force la concurrence des vendeurs et des acheteurs, il met obstacle à des échanges plus avantageux et détruit le plus puissant stimulant qui puisse aiguillonner l’activité et l’industrie de ses propres sujets, les piquer d’une utile émulation et les mettre dans la nécessité d’obtenir une juste préférence sur tous autres par la bonne qualité et par le bon prix ; enfin lorsqu’il veut, par des faveurs et des récompenses, attirer le travail et les capitaux dans des voies que leur propre intérêt les détourne de suivre, parce qu’ils reconnaissent que leurs produits y seraient inférieurs.

Rien, sans doute, ne serait plus facile que de concilier ces deux écoles et de les ramener aux mêmes principes ; mais la tâche véritablement difficile, celle qu’il ne faut pas se flatter de pouvoir remplir de longtemps, ce serait de déterminer l’administration publique à se désister des mesures fausses et illusoires auxquelles elle attache tant d’importance, et pour la conservation desquelles tant d’intérêts particuliers seront toujours prêts à se coaliser.

On a été dans ces derniers temps jusqu’à contester à Smith qu’il ait été le créateur de la doctrine qui fait dériver la richesse du travail. Longtemps avant Smith, sans doute, il avait été reconnu que l’homme doit au travail ses moyens de subsistance, et que les nations comme les individus ne peuvent s’enrichir qu’à force de travail et d’industrie. C’est une vérité aussi ancienne que le monde. On la trouve consignée dans les premières pages d’un livre que sa haute antiquité et la simplicité sublime avec laquelle il est écrit, suffiraient seules pour recommander à la vénération des hommes. (Genèse, chap. 3, v. 17 et 19.) Tous ceux qui ont été appelés à instruire ou à gouverner des sociétés humaines, et qui ont cherché à les rendre heureuses et puissantes, se sont appliqués à leur présenter tous les moyens possibles d’encouragement au travail, et l’on ne connaît guère de législateurs ou de moralistes qui n’aient prescrit aux hommes de tra-