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moyen pour tout ce siècle, leur prix réel a vraisemblablement été tant soit peu plus haut qu’il n’était dans ces anciens temps. La nature de cette denrée ne la rend pas tout à fait aussi propre à être transportée au loin que la laine. Elle risque plus à être gardée. Un cuir salé est regardé comme inférieur à un cuir frais, et se vend moins cher. Cette circonstance doit nécessairement tendre à faire baisser le prix des peaux crues produites dans un pays qui ne les manufacture point, mais qui est obligé de les exporter, et à élever comparativement le prix de celles qui sont produites dans un pays où on les manufacture. Elle doit tendre à faire baisser leur prix dans un pays barbare, et à le faire hausser dans un pays riche et manufacturier. Elle doit donc avoir eu quelque tendance à le faire baisser dans l’ancien temps, et à le faire monter dans celui-ci. Et puis, nos tanneurs n’ont pas tout à fait aussi bien réussi que nos fabricants de draps à persuader à la sagesse nationale que le salut de la chose publique dépendait de la prospérité de leur manufacture particulière. Ils ont en conséquence été bien moins favorisés. À la vérité, on a prohibé l’exportation des peaux crues, et on l’a déclarée délit public[1]. Mais leur importation des pays étrangers a été assujettie à un droit ; et quoique ce droit ait été supprimé pour cinq années seulement sur celles importées de l’Irlande et de nos colonies, cependant l’Irlande n’a pas été restreinte au seul marché de la Grande-Bretagne pour la vente de l’excédent de ses peaux ou de celles qui ne sont pas manufacturées chez elle. Il n’y a que très-peu d’années que les peaux de bétail commun ont été mises au nombre des marchandises que les colonies ne peuvent envoyer ailleurs qu’à la mère patrie[2], et enfin le commerce d’Irlande n’a pas, sur cet article, été opprimé jusqu’à présent dans la vue de soutenir les manufac­tures de la Grande-Bretagne.

Tous les règlements, quels qu’ils soient, qui tendent à abaisser le prix, soit de la laine, soit de la peau crue, au-dessous de ce qu’il serait naturellement, doivent néces­sai­rement, dans un pays cultivé et amélioré, avoir quelque tendance à faire hausser le prix de la viande de boucherie. Il faut que le prix du bétail qu’on nourrit sur une terre améliorée et cultivée, soit gros, soit menu bétail, suffise à payer la rente et le profit que le propriétaire et le fermier sont en droit d’attendre d’une

  1. On déclare nuisances tout ce qui est censé délit public et de nature à être poursuivi, par voie de plainte ou accusation, à la requête du ministère public.
  2. Ce sont les marchandises énumérées. Voyez liv. IV, chap vii.