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Tchong-kiue. il résida chez les Jong de l’ouest et défendit la marche[1] de l’Ouest. Il engendra Fei-lien. Fei-lien engendra Ngo-lai[2]. Ngo-lai était fort ; Fei-lien était bon marcheur. Le père et le fils mirent leurs talents au service de Tcheou, (de la dynastie) Yn. Lorsque le roi Ou (de la dynastie) Tcheou vainquit Tcheou, il tua aussi Ngo-lai. En ce temps, Fei-lien (faisait) dans le nord un (sarcophage[3] de) pierre pour Tcheou ; à son retour, il n’y avait personne à qui il pût rendre compte de sa mission[4] ; il éleva un autel sur le Houo-t’ai-chan[5] et annonça qu’il avait trouvé un sarcophage de pierre ; l’inscription (qu’on découvrit ensuite sur le sarcophage) était ainsi conçue : « L’Empereur a ordonné que Tch’ou-fou ne fût pas présent au désastre des Yn ; il lui a donné ce sarcophage de pierre pour rendre illustre sa famille[6]. » Il mourut et fut enterré sur le Houo-T’ai-chan.

  1. Le mot [], signifiant territoire-frontière, rappelle assez exactement l’idée de ces marches (par exemple, la marche de Brandebourg) dont les margraves étaient les défenseurs du monde civilisé contre les barbares. La marche occidentale, ou marche de Si, avait son centre à 120 li au sud-ouest de l’actuelle préfecture secondaire de Ts’in, dans le Kan-sou.
  2. Cf. tome I, p. 203.
  3. J’ajoute le mot « sarcophage » que suppose le commentaire de Siu Koang.
  4. Se-ma Tcheng dit : « Tcheou étant mort, il n’y avait personne à qui (Fei-lien) put revenir rendre compte de sa mission ; c’est pourquoi il éleva un autel et, s’étant rendu sur le Houo-t-ai-chan, il y sacrifia à Tcheou en lui annonçant qu’il avait fait et trouvé le sarcophage de pierre.
  5. Cf. tome I, notes 02.124. et 02.221. .
  6. Cette formule très concise est difficile à bien comprendre. L’empereur dont il est question doit être l’Empereur d’en haut ou le Ciel, qui a voulu que Fei-lien (dont Tch’ou-fou est le surnom) fût absent au moment où la dynastie Yn était détruite par le roi Ou. Voici le commentaire de Se-ma Tcheng à ce passage : « Cela signifie que Tch’ou-fou était d’un extrême loyalisme ; lorsque son royaume eut été détruit et que son prince eut été mis à mort, il ne faillit point à la fidélité qui convient à un sujet ; c’est pourquoi le Ciel lui fit présent du sarcophage de pierre afin d’illustrer sa famille. Cette anecdote n’est d’ailleurs point authentique ; Ts’iao Tcheou n’y croit aucunement. — Ts’iao Tcheou vivait vers le milieu du IIIe siècle de notre ère ; il est l’auteur de l’Examen des anciens historiens. — En résumé, voici comment je comprends cette anecdote : Fei-lien avait été chargé de rapporter à son souverain un sarcophage ; à son retour, il trouva son souverain mort ; il monta alors sur une montagne et s’adressa à l’esprit du défunt pour lui annoncer qu’il s’était bien acquitté de sa mission. Puis, il mourut à son tour. Plus tard, on trouva sur cette montagne un sarcophage avec une inscription qui attestait que le Ciel avait fait don du sarcophage à Fei-lien lui-même, afin de le récompenser de son loyalisme. — L’origine de cette légende doit sans doute être recherchée dans le fait qu’on trouva effectivement un sarcophage avec l’inscription mentionnée par Se-ma Ts’ien ; c’est pour expliquer cette inscription fort obscure qu’on imagina la légende. — Je dois reconnaître cependant que M. De Groot donne une traduction assez différente de ce passage (The religious system of China, tome I, p. 283).