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il plaça des administrateurs, des gouverneurs militaires et des surintendants[1] ; il appela le peuple d’un nom nouveau, « les têtes noires »[2] ; il célébra un grand banquet

  1. Cf. tome II, Appendice I, § 4, n° 1.
  2. Cette appellation de « têtes noires » ne me paraît pas avoir été forgée pour distinguer les Chinois, dont les cheveux sont toujours noirs, des peuples étrangers qui pouvaient être blonds ou bruns ; cette expression désignerait plutôt ceux dont les cheveux sont encore noirs, c’est-à-dire les hommes dans la force de l’âge, par opposition aux vieillards qui ont les cheveux gris et n’appartiennent plus à la classe de ceux qu’on peut considérer comme formant la partie essentielle de la nation. — Il est assez singulier que cette même expression de « têtes noires » se retrouve dans la Chaldée primitive, sur les inscriptions les plus anciennes. Voici ce que dit à ce sujet M. Maspero (Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, tome I, p. 598, note 1) : « L’expression de Têtes-noires, nishi salmat kakkadi, a été prise dans un sens ethnographique, comme désignant l’une des races de la Chaldée, la sémitique (Hommel, Geschichte Babyloniens und Assyriens, p. 29, note 2) ; d’autres assyriologues la considèrent comme une désignation de l’humanité en général (Pognon, L’inscription de Bavian, p. 27-28 ; Schrader, dans la Zeitschrift für Assyriologie, t. I, p. 320). Ce dernier sens paraît être le plus vraisemblable. — Si l’on considère que les inscriptions chaldéennes où il est fait mention des Têtes-noires sont antérieures de plus de mille ans à Ts’in Che-hoang-ti, il paraît bien impossible de prétendre, comme le fait M. Terrien de Lacouperie, que les Chinois ont tiré cette appellation de la Chaldée (cf. The Black-heads of Bahylonia and ancient China, B. and O. R. vol. V, pp. 233-237 ; — Western origin of the early Chinese civilisation, pp. 20, 96, 97, 98, 380) ; on n’est pas en droit de supposer une filiation pour expliquer une coïncidence entre deux faits si prodigieusement distants l’un de l’autre dans le temps et dans l’espace. Une autre explication très plausible m’a été suggérée par un de mes auditeurs au Collège de France, M. David : Ts’in Che-hoang-ti avait mis en honneur l’élément eau dont la couleur caractéristique est le noir ; le peuple fut donc appelé « les Têtes-noires » par une nouvelle application de la théorie des cinq éléments.