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s’emparer d’abord de Han, afin d’effrayer les autres royaumes ; alors (le roi) chargea Li Se de soumettre Han ; le roi de Han, tout anxieux, forma des projets avec Han Fei pour affaiblir Ts’in[1]. — Un homme de Ta-leang, Wei Leao, vint auprès du roi de Ts’in et lui donna ce conseil :

— Étant donnée la puissance de Ts’in, on peut comparer les seigneurs à des sujets chefs de commanderies ou de préfectures ; la seule chose à craindre est que les seigneurs ne s’unissent en une ligue du nord au sud et que de leur accord ne résulte une chose imprévue. C’est là certes ce qui a perdu Tche-po[2], Fou-tch’a[3] et le roi Min[4]. Je désire que Votre Majesté ne soit pas trop attachée à ses richesses, mais qu’elle soudoie les ministres influents de ces (seigneurs) afin de jeter le trouble dans leurs projets. Il ne lui en coûtera pas plus de trois cent mille livres d’or, pour que les seigneurs soient réduits à l’extrémité.

Le roi de Ts’in suivit cet avis ; il reçut Wei Leao avec de grands égards ; ses vêtements, sa nourriture et sa boisson furent les mêmes que ceux de (Wei) Leao. (Wei) Leao dit :

— Le roi de Ts’in est un homme au nez proéminent, aux yeux larges, à la poitrine d’oiseau de proie ; il a la voix du chacal ; il est peu bienfaisant et a le cœur d’un tigre ou d’un loup Tant qu’il se trouve embarrassé, il lui est facile de se soumettre aux hommes ; quand il aura atteint son but, il lui sera également aisé de dévorer les hommes[5]. Je n’ai que des vêtements de

  1. Sur Han Fei tse, cf. Mémoires historiques, chap. LXIII.
  2. Cf. tome I, note 04.496. .
  3. Sur Fou-tch’a, roi de Ou, cf. Mémoires historiques, chap. XXXI.
  4. Le roi Min, du pays de Ts’i, régna de 313 à 284 avant J.-C. Cf. Mémoires historiques, chap. XLVI.
  5. L’expression [] a ici un sens très différent de celui qu’elle a dans un passage de Mencius (III, a, 4 ; trad. Legge, p. 126), où elle signifie : donner à manger aux hommes, entretenir les hommes. — Le commentaire de Tchang Cheou tsie dit cependant : « Que Che-hoang réalise ses intentions au sujet de l’empire, c’est aussi ce qui sera facile ; alors il se fera entretenir par les hommes. Nous serions ainsi ramenés au sens qu’il faut voir dans la phrase de Mencius : « ceux qui gouvernent les hommes sont entretenus par eux. Mais l’absence de la particule dans le texte de Se-ma Ts’ien me semble rendre inadmissible l’explication de Tchang Cheou-tsie.