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Lao Ngai[1] fut anobli sous le titre de marquis de Tch’ang-sin ; on lui donna le territoire de Chan-yang[2] ; il reçut l’ordre d’y demeurer ; ce qui concernait les palais et les édifices, les chevaux et les chars, les vêtements, les jardins et les parcs, les courses et les chasses, était réglé à la fantaisie de Ngai ; il n’était aucune affaire grande ou petite, qui ne fût décidée par Ngai ; en outre, les commanderies de Ho-si et de T’ai-yuen furent transformées en royaume de Ngai. La neuvième année (238 av. J.-C.), une comète parut et remplit presque tout le ciel. (Ts’in) attaqua Yuen et P’ou-yang[3], villes de (l’État de) Wei. — Le quatrième mois, le souverain passa une nuit à Yong. Au jour ki-yeou, le roi prit le chapeau viril et ceignit l’épée[4]. (Lao) Ngai, marquis de Tch’ang-sin, fomenta une rébellion ; ayant été découvert, il contrefit le sceau[5] personnel du roi et

  1. On trouvera des détails sur cet ignoble personnage amant de la reine mère, dans le LXXXVe chapitre des Mémoires historiques.
  2. Aujourd’hui, sous-préfecture de Sieou-ou, préfecture de Hoai-k’ing, province de Ho-nan.
  3. Yuen était à 20 li à l’ouest de la sous-préfecture actuelle de Yuen-k’iu, préfecture secondaire de Kiang, province de Chàn-si. — Fou-yang était à peu de distance au nord de l’actuelle préfecture secondaire de Si, province de Chan-si.
  4. Le roi était alors âgé de vingt-deux ans.
  5. Les commentateurs chinois font quelques remarques intéressantes sur le mot []. Ce caractère désignait à l’origine un sceau quelconque ; ce n’est qu’à partir de Ts’in Che-hoang-ti qu’il fut employé exclusivement pour désigner le sceau impérial et, comme le sceau impérial était en jade, c’est à partir de ce moment, dit le Chouo wen phonétique (chap. XII, p. 134 v°), qu’on modifia la forme de ce caractère en substituant au caractère [] qui se trouvait à sa base, le caractère [] = jade. — D’après Ts’oei Hao (cf. Mayers, n° 789), le sceau de Ts’in Che-hoang-ti avait été taillé par Li Se dans le fameux jade de Ho (cf. Mayers, n° 551). Tous les empereurs Han se le transmirent et le portèrent de génération en génération. On l’appelait « le sceau qui transmet l’État ». — Wei Yao, dans son ouvrage intitulé Ou chou, dit : « Le sceau était un carré de 4 pouces de côté ; au sommet se trouvaient cinq dragons entrelacés. L’inscription qui y était gravée était la suivante : Ayant reçu le décret du Ciel, j’ai donc la longévité et la prospérité éternelle. Le livre des Han dit que l’inscription du sceau était : Par le décret du Ciel majestueux, le souverain-empereur a la longévité et la prospérité. Enfin le Kin che souo (chap. V, p. 1-3) donne quatre estampages reproduisant deux sceaux attribués à Ts’in Che-hoang-ti ; sur l’un d’eux est l’inscription indiquée par Wei Yao (cf. l’image réduite qui a été publiée de ce sceau par M. F. Hirth, T’oung pao, vol. VI, n° 3, p. 329, d’après le Che kou yn p’ou) ; sur l’autre est l’inscription mentionnée par le livre des Han, mais avec cette variante que le premier caractère est [] et non []. Ces reproductions nous paraissent d’ailleurs de pure fantaisie. Le commentaire de Tchang Cheou tsie ajoute quelques détails curieux sur la transmission du sceau jusqu’aux T’ang : Le chapitre sur Yuen-heou, dans le livre des Han, dit : § Wang Mang (l’usurpateur qui monta sur le trône en l’an 9 ap. J.-C.) ordonna à Wang Choen de prendre de force le sceau à l’impératrice douairière ; l’impératrice douairière le jeta par terre avec colère ; un angle se brisa légèrement. § Le Ou tche (section du San kouo tche) dit : Soen Kien (d. 191 ap. J.-C.), étant entré à Lo, balaya et nettoya le temple ancestral des tombes des Han ; ses soldats trouvèrent dans le puits Tchen-koan le sceau impérial. § Dans la suite, ce sceau fit retour à la dynastie Wei (210-261). § Sous l’empereur Hoai, des Tsin, le 6e mois de la 15e année yong-kia (311 ap. J.-C.), l’empereur s’enfuit à P’ing-yang et le sceau tomba entre les mains de Lieou Tsong des Tchao antérieurs. § Puis, sous l’empereur Tch’eng, des Ts’in orientaux, la 3e année hien-ho (329 ap. J.-C.), Che-le anéantit les Tchao antérieurs et obtint le sceau. § La 8e année yang-ho (352 ap. J.-C.) de l’empereur Mou, Che-le fut détruit par Mou-yong Tsiun, Le gouverneur de P’ou-yang, Tai Che, entra à Ye (aujourd’hui Lin-tchang, dans le Ho-nan) et trouva le sceau ; il chargea Ho Yong de le remettre aux Tsin. § Ceux-ci le transmirent aux Song, § qui le transmirent aux Ts’i méridionaux ; § ceux-ci le transmirent aux Leang. Les Leang se le transmirent jusqu’à la 1e année t’ien tcheng (552 ap. J.-C. ; mais d’après l’annotation critique de l’édition K’ien-long, il faudrait lire la 2e année ta-pao, soit 550), époque à laquelle Heou King écrasa les Leang et arriva à Koang-ling. § Un général des Ts’i septentrionaux, Sin Chou, s’empara de Koang-ling et trouva le sceau qu’il envoya aux Ts’i septentrionaux (550-577). § Puis les Tcheou, les mois de la 6e année kien- (575) vainquirent les Ts’i septentrionaux et le sceau tomba entre leurs mains. § Les Tcheou le transmirent aux Soei et les Soei aux T’ang. Quoique cette tradition ne soit pas digne de foi dans toutes ses parties, elle méritait cependant d’être rappelée ; en effet, le sceau est l’emblème du pouvoir conféré par le Ciel ; l’histoire de sa transmission nous montre donc du moins quelle était l’idée qu’on se faisait à l’époque des T’ang de la suite des dynasties suivant le principe de la légitimité.