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Entrent POLONIUS, ROSENCRANTZ et GUILDENSTERN.

HAMLET. — Eh bien, Monseigneur ! le roi entendra-t-il. cette pièce ?.

POLONIUS. — Et la reine aussi, et cela immédiatement.

HAMLET. — Allez avertir les comédiens de se dépêcher. (Sort Polonius.) Voulez-vous, vous deux, aller aussi les faire se hâter ?

ROSENCRANTZ et GUILDENSTERN, — Nous voulons bien, Monseigneur. (Ils sortent.)

HAMLET. — Hé ! Horatio !

Entre HORATIO.

HORATIO. — Présent, à votre service, mon aimable Seigneur.

HAMLET. — Horatio, tu es l’homme le plus juste avec qui j’aie jamais entretenu commerce.

HORATIO. — Ô mon cher Seigneur !

HAMLET. — Parbleu, ne crois pas que je flatte. ; car quel, avancement puis-je espérer de toi qui n’as d’autre revenu que ton bon esprit pour te nourrir et te vêtir ? Pourquoi le pauvre serait-il flatté ? Non, que les langues de sucre lèchent la pompe stupide, et que les souples genoux se courbent là où la récompense peut suivre immédiatement la flatterie. Entends-tu ? Depuis que mon âme qui m’est chère fut maîtresse de son choix et pût distinguer entre les hommes, sa préférence t’a scellé pour son partage ; car tu t’es montre un homme qui, en sachant tout souffrir, t’es exempté de toute souffrance, un homme qui a su recevoir les rebuffades et les récompenses de la fortune avec d’égaux remercîments : et bienheureux ceux dont le sang et le jugement, sont en si bel équilibre, qu’ils ne sont pas de ces flûtes sur lesquelles la Fortune peut jouer tout air qu’elle veut. Donne-moi l’homme qui n’est pas l’esclave de la passion, et je le porterai tout près de mon cœur, oui, je le porterai dans le cœur de mon cœur, comme je fais de toi. En voilà déjà trop là-