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Brutus. — Lorsque j’ai parlé comme j’ai fait, j’étais moi-même en mauvaises dispositions.

Cassius. — En avouez-vous autant ? donnez-moi votre main.

Brutus. — Et mon cœur aussi.

Cassius. — Ô Brutus…

Brutus. — Qu’y a-t-il ?

Cassius. — N’avez-vous pas assez d’amitié pour me supporter, lorsque cette humeur emportée que ma mère m’a donnée, me pousse à m’oublier ?

Brutus. — Si, Cassius ; par conséquent, lorsque vous serez dorénavant par trop bouillant avec votre Brutus, il supposera que c’est votre mère qui gronde et vous laissera tranquille.

Un poëte, de l’extérieur. — Laissez-moi entrer pour voir les généraux ; il y a quelque pique entre eux, il n’est pas bon qu’ils soient seuls.

Lucilius, de l’extérieur. — Vous n’irez pas les trouver.

Le poëte, de l’extérieur. — La mort seule pourrait m’arrêter.


Entre le poëte, suivi de LUCILIUS et de TITINIUS.

Cassius. — Qu’est-ce donc ? qu’y a-t-il ?

Le poëte. — Par pudeur, généraux ! à quoi pensez-vous ? aimez-vous, soyez amis comme doivent l’être deux hommes tels que vous ; car, j’en suis sûr, j’ai vu plus d’années que vous.

Cassius. — Ah, ah ! comme ce cynique rime misérablement !

Brutus. — Partez d’ici, maraud : impertinent compère, hors d’ici !

Cassius. — Supportez-le, Brutus : c’est sa façon d’être,

Brutus. — Je m’informerai de son humeur, lorsqu’il s’informera mieux de l’heure : qu’est-ce que les choses de la guerre ont à faire avec ces sots rimailleurs ? Hors d’ici, camarade !

Cassius. — Allons, allons, décampe2 ! (Sort le poëte)

Brutus. — Lucilius et Titinius, ordonnez aux capi-