Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1870, tome 7.djvu/399

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

caractère oratoire, et se distingue par là de toutes les autres pièces de Shakespeare. C’est probablement à ces particularités que nous devons la correction relative de cette pièce ; car elle n’offre rien qui puisse embarrasser même l’esprit le plus ordinaire et le moins sagace.

Ainsi la date de sa production devrait être comprise entre 1600 et 1603, si l’on en juge d’après l’examen du style, aucune des pièces qui précèdent cette époque n’étant aussi sobre d’images, et aucune de celles qui la suivent n’ayant une telle ampleur et une telle aisance de langage. Malone cependant conjecturait qu’elle avait pu être écrite vers 1607 ; mais la raison qu’il donne de cette opinion est assez peu satisfaisante. Cette raison, c’est qu’en cette année 1607 parut une pièce sur le même sujet par le comte de Sterline, et qu’il s’y rencontre une ou deux idées dont Shakespeare aurait fait son profit. Si Shakespeare a profité de la pièce de Sterline comme le croyait Malone, il faut avouer qu’il s’est bien dépêché de tirer avantage de cette publication, et que son chef-d’œuvre a suivi de bien près la production de son prétendu rival. Si l’opinion de Malone est fondée, ce n’est pas en 1607 qu’il faut rapporter la composition de Jules César, mais dans les années qui ont suivi. Malheureusement pour l’hypothèse de Malone, les érudits et bibliophiles modernes ont établi qu’avant l’édition de 1607 le drame de Sterline en avait eu une première en Écosse trois ans auparavant. Un critique moderne, M. Collier, a découvert un sentier détourné par lequel il s’est approché plus sûrement de la date probable. Il a été frappé de la ressemblance qui existe entre un passage d’un poëme de Drayton, les Guerres des barons, où le poëte résume le caractère de Mortimer, et le passage où par la bouche d’Antoine Shakespeare résume le caractère de Brutus : « Sa vie fut noble, et les éléments étaient en lui mêlés de telle sorte que la nature pouvait se lever et dire au monde entier, « c’était un homme. » La ressem-