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SCÈNE V.

et quant aux imbéciles, qu’ils usent de leurs talents.

maria.

Vous n’en serez pas moins pendu pour vous être absenté si longtemps, ou vous serez chassé ; et pour vous, ça n’équivaut-il pas à être pendu ?

feste.

Une bonne pendaison empêche souvent un mauvais mariage ; et quant à être chassé, l’été y pourvoira.

maria.

Vous êtes donc bien résolu ?

feste.

Non ; mais je suis résolu sur deux points.

maria.

Deux pointes d’épingles ! si l’une se rompt, l’autre tiendra ; ou, si toutes deux se rompent, à bas les culottes.

feste.

Bon, ma foi, très-bon !… Allons, va ton chemin ; du jour où sir Tobie cessera de boire, tu seras le plus spirituel morceau de la chair d’Ève qu’il y ait en Illyrie.

maria.

Paix, chenapan ! En voilà assez. Voici madame qui vient : faites prudemment vos excuses, je vous le conseille.

Elle sort.
Entrent Olivia et Malvolio.
feste.

Esprit, si c’est ton bon plaisir, mets-moi en folle verve. Les beaux esprits qui croient te posséder, ne sont souvent que des sots ; et moi, qui suis sûr de ne pas te posséder, je puis passer pour spirituel. Car que dit Quinapalus ? Mieux vaut un fou d’esprit qu’un sot bel esprit… Dieu te bénisse, ma dame !