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SCÈNE IV.

quelque chose te sépare de moi, c’est quelque plante de rebut, — lierre parasite, ronce ou mousse stérile, — qui, faute d’être élaguée, devient envahissante, — corrompt ta sève et vit de ta ruine.

antipholus de syracuse.

— C’est à moi qu’elle parle, c’est moi qu’elle prend pour thème de ses invocations ! — Quoi ! l’aurais-je épousée en rêve ? — ou serais-je endormi à présent, et songerais-je que j’entends tout ceci ? — Quelle erreur égare nos oreilles et nos yeux ? — Jusqu’à ce que j’aie éclairci cette incertitude, — je veux me prêter à l’illusion qui s’offre.

luciana.

— Dromion, va dire aux valets de servir le dîner.

dromion de syracuse, à part.

— Ah ! où est mon chapelet ? Je me signe, comme un pécheur. — C’est ici le pays des fées… Ô mésaventure des mésaventures ! — Nous parlons à des lutins, à des goules, à des elfes ; — si nous ne leur obéissons pas, il s’ensuivra ceci, — qu’ils avaleront notre haleine ou qu’ils nous pinceront jusqu’au noir, jusqu’au bleu !

luciana.

— Que marmonnes-tu là, au lieu de répondre ? — Dromion, frelon, limaçon, fainéant, sot que tu es !

dromion de syracuse, à Antipholus.

— Je suis métamorphosé, maître, n’est-ce pas ?

antipholus de syracuse.

— Je crois que tu l’es dans l’âme, ainsi que moi.

dromion de syracuse.

— Non, je suis métamorphosé, corps et âme.

antipholus de syracuse.

— Tu as bien ta propre forme.

dromion de syracuse.

— Non, je suis un sapajou.