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SCÈNE V.

favorables pour la rencontrer ; j’ai payé chèrement la plus mince occasion de l’entrevoir, fût-ce un instant. Non-seulement j’ai acheté pour elle bien des présents, mais j’ai donné beaucoup à bien des gens pour savoir quels dons elle pouvait souhaiter. Bref, je l’ai poursuivie comme l’amour me poursuivait moi-même, c’est-à-dire sur les ailes de toute occasion. Mais, quoi que j’aie pu mériter, soit par mes sentiments, soit par mes procédés, je suis bien sûr de n’en avoir retiré aucun bénéfice, à moins que l’expérience ne soit un trésor ; pour celui-là, je l’ai acheté à un taux exorbitant, et c’est ce qui m’a appris à dire ceci :

L’amour fuit comme une ombre l’amour réel qui le poursuit,
Poursuivant qui le fuit, fuyant qui le poursuit.

falstaff.

N’avez-vous reçu d’elle aucune promesse encourageante ?

gué.

Aucune.

falstaff.

L’avez-vous pressée à cet effet ?

gué.

Jamais.

falstaff.

De quelle nature était donc votre amour ?

gué.

Comme une belle maison bâtie sur le terrain d’un autre ! En sorte que j’ai perdu l’édifice pour m’être trompé d’emplacement.

falstaff.

Dans quel but m’avez-vous fait cette révélation ?

gué.

Quand je vous l’aurai dit, je vous aurai tout dit. Il y a des gens qui prétendent que, si rigide qu’elle paraisse à