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HENRY VIII.

colère — ce que vous allez faire. Pour gravir des hauteurs escarpées, — il faut d’abord marcher lentement. Le courroux est — un cheval entier et ardent : si on le laisse aller à sa guise, — sa fougue même l’éreinte. Personne en Angleterre — ne pourrait me conseiller aussi bien que vous : soyez pour vous-même — ce que vous seriez pour votre ami.

buckingham.

Je vais trouver le roi ; — et sous le cri de l’honneur j’abattrai à jamais — l’insolence de ce cuistre d’Ipswich, ou je proclamerai — qu’il n’y a pas d’inégalité entre les hommes.

norfolk.

Réfléchissez. — N’allumez pas pour votre ennemi une fournaise assez chaude — pour vous roussir vous-même. Nous pouvons dépasser, — par une violente vitesse, le but que nous voulons atteindre, — et échouer par excès d’élan. Ne savez-vous pas — que le feu qui fait déborder la liqueur, — en semblant l’augmenter, l’épuise ? Réfléchissez. — Je le répète, il n’y a pas une âme en Angleterre — plus capable de vous diriger que vous-même, — si vous voulez avec la sève de la raison éteindre — ou seulement modérer le feu de la passion.

buckingham.

Monsieur, — je vous suis reconnaissant, et je me guiderai — d’après votre prescription ; mais cet arrogant gaillard — (je n’en parle pas avec fiel, mais — avec une honnête émotion), des renseignements — et des preuves, claires comme les ruisseaux en juillet dont — nous voyons chaque grain de sable, m’ont démontré — qu’il est corrompu et traître.

norfolk.

Ne dites pas traître.

buckingham.

— Je le dirai au roi, et je donnerai à ma déclaration la