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HENRY VI.

richard, au lieutenant.

— L’ami, laisse-nous seuls : nous avons à causer.

Le lieutenant sort.
le roi henry.

— Ainsi le pâtre négligent fuit le loup ; — ainsi l’inoffensive brebis livre d’abord sa toison, — puis sa gorge au couteau du boucher ! — Quelle scène de mort Roscius va-t-il donc jouer ?

richard.

— Le soupçon hante toujours l’âme coupable ; — le voleur redoute un exempt dans chaque buisson.

le roi henry.

— L’oiseau qui a été englué dans un buisson — évite tout buisson d’une aile tremblante ; — et moi, le malheureux père d’un doux oiseau, — j’ai maintenant sous les yeux le fatal objet — par lequel fut englué, saisi et tué mon pauvre petit.

richard.

— Ah ! quel fol entêté que ce Crétois — qui fit faire à son fils l’office d’un oiseau ! — En dépit de ses ailes, l’imbécile fut noyé.

le roi henry.

— Je suis Dédale ; mon pauvre enfant, Icare ; — ton père, le Minos qui entrava notre marche ; — le soleil qui fondit les ailes de mon doux fils, — c’est ton frère Édouard ; et toi-même, tu es la mer — dont le gouffre haineux engloutit sa vie. — Ah ! tue-moi avec ton arme, non avec tes paroles ! — Ma poitrine peut mieux supporter la pointe de ta dague — que mon oreille cette tragique histoire. — Mais pourquoi viens-tu ? Est-ce pour avoir ma vie ?

richard.

— Crois-tu donc que je sois un exécuteur ?

le roi henry.

— Tu es, j’en suis sûr, un persécuteur. — Si le meurtre