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SCÈNE IV.

york.

— Son visage, à lui, les cannibales affamés — ne l’auraient pas touché, ne l’auraient pas ensanglanté ; — mais vous êtes plus inhumains, plus inexorables, — oh ! dix fois plus !… que les tigres d’Hyrcanie. — Vois, reine insensible, les larmes d’un père désolé. — Ce linge, tu l’as trempé dans le sang de mon doux enfant, — mais, moi, j’en lave le sang avec mes larmes. — Reprends ce mouchoir, et va te vanter de ceci.

Il lui rend le mouchoir.

— Et, si tu racontes exactement la lamentable histoire, — sur mon âme, les auditeurs verseront des larmes. — Oui, mes ennemis même verseront des larmes à flot, — et diront : Hélas ! ce fut une pitoyable action ! — Tiens, prends cette couronne, et, avec cette couronne, ma malédiction ! — Et puisses-tu, dans ta détresse, trouver la consolation — que je recueille maintenant de ta trop cruelle main ! — Implacable Clifford, enlève-moi de ce monde. — Mon âme au ciel, mon sang sur vos têtes !

northumberland.

— Eût-il massacré toute ma famille, — je ne pourrais pas m’empêcher de pleurer avec lui, — en voyant quelle douleur poignante étreint son âme.

la reine marguerite.

— Quoi ! vous en êtes à larmoyer, milord Northumberland ? — Songez seulement au mal qu’il nous a fait, — et cela aura bientôt séché vos pleurs.

clifford.

— Voilà pour mon serment, voilà pour la mort de mon père.

Il poignarde York.
la reine marguerite.

— Et voici pour venger notre excellent roi.

Elle le poignarde.
york.

— Ouvre les portes de ta miséricorde, Dieu de grâce !