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SCÈNE IV.

Je t’en prie, désole-toi pour m’égayer, York : — trépigne, rage, écume, que je puisse chanter et danser ! — Quoi ! les ardeurs de ton cœur ont-elles à ce point desséché tes entrailles — que tu ne puisses verser une larme sur la mort de Rutland ! — Pourquoi tant de patience, l’homme ? Tu devrais être furieux ; — et c’est pour te rendre furieux que je me moque ainsi de toi. — Je le vois, pour m’amuser, tu veux un salaire. — York ne saurait parler, sans porter une couronne. — Une couronne pour York !… Et vous, milords, inclinez-vous bien bas devant lui !… — Tenez-lui les mains, pendant que je vais le couronner.

Elle lui met sur la tête une couronne de papier.

— Eh ! ma foi, messieurs, il a l’air d’un roi maintenant ! — Oui-dà, voilà celui qui occupait le trône du roi Henry, — voilà celui qui était son héritier d’adoption… — Mais comment se fait-il que le grand Plantagenet — soit couronné si tôt et viole son serment solennel ? — Si je ne me trompe, vous ne deviez être roi — que quand Henry aurait donné la main à la mort. — Et vous ceignez ainsi votre tête de l’auréole de Henry, — et vous frustrez son front du diadème, — lui vivant, au mépris de votre serment sacré ! — Oh ! c’est un crime trop, bien trop impardonnable ! — À bas cette couronne ! et, avec cette couronne, à bas cette tête ! — Que le temps qui nous suffit à respirer suffise à le mettre à mort !

clifford.

— Je réclame cet office, en souvenir de mon père.

la reine marguerite.

— Non, arrêtez !… Écoutons-le faire ses oraisons.

york.

— Louve de France, pire même que les loups de France, — toi dont la langue est plus venimeuse que la dent de la vipère, — qu’il sied mal à ton sexe — de triompher, amazone infâme, — du malheur de ceux que la fortune tient captifs ! — Si ta face n’était pas impassible comme un mas-