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SCÈNE XII.

le capitaine.

— Laissez-moi d’abord le poignarder de mes paroles, comme il m’a poignardé des siennes.

suffolk.

— Vil manant, tes paroles sont aussi obtuses que tu es obtus.

le capitaine.

— Emmenez-le d’ici, et tranchez-lui la tête — sur le côté de notre chaloupe.

suffolk.

Tu n’oserais, il y va de la tienne.

le capitaine.

— Si fait, Poole !

suffolk.

Poole ?

le capitaine.

Poole ? Sir Poole ? Lord Poole ? — Poule d’eau bourbeuse, de sentine et d’égout, qui de tes ordures et de ta fange — souilles la source argentine où s’abreuve l’Angleterre !… — Je vais donc clore ta bouche béante — qui a englouti les trésors du royaume ! — Tes lèvres, qui ont baisé la reine, vont balayer la poussière ! — Et toi, que faisait sourire la mort du bon duc Homphroy, — vainement tu grinceras des dents aux vents insensibles — qui te répondront de leur sifflement dédaigneux. — Va, sois marié aux sorcières de l’enfer — pour avoir osé fiancer un puissant prince — à la fille d’un misérable roi — sans sujets, sans fortune et sans diadème ! — Tu as grandi par une politique diabolique, — et, comme l’ambitieux Sylla, tu as dévoré, — bouchée par bouchée, le cœur saignant de ta mère ! — Par toi l’Anjou et le Maine ont été vendus à la France ; — les Normands félons et rebelles, grâce à toi, — refusent de nous reconnaître pour maîtres ; et la Picardie — a égorgé ses gouverneurs, sur-