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LE ROI LEAR.

edgar.

— Ou bien l’image de son horreur ?

albany.

Qu’il s’abîme donc et disparaisse !

lear.

— Cette plume remue ! Elle vit ! S’il en est ainsi, — voilà une chance qui rachète toutes les souffrances — que j’ai supportées jusqu’ici.

kent, se jetant aux genoux du roi.

Ô mon bon maître !

lear.

— Arrière, je te prie.

edgar.

C’est le noble Kent, votre ami.

lear.

— Peste soit de vous tous, meurtriers et traîtres ! — J’aurais pu la sauver : maintenant elle est partie pour toujours ! — Cordélia ! Cordélia ! attends un peu. Ha ! — qu’est-ce que tu dis ?… Sa voix était toujours douce, — calme et basse ; chose excellente dans une femme… — J’ai tué le misérable qui t’étranglait.

l’officier.

— C’est vrai, messeigneurs, il l’a tué.

lear.

N’est-ce pas, camarade ? — J’ai vu le temps où, avec ma bonne rapière mordante, — je les aurais fait tous sauter. Je suis vieux maintenant, — et tous ces tracas me ruinent…

À Kent.

Qui êtes-vous ? — Mes yeux ne sont pas des meilleurs… Je vais vous le dire tout à l’heure.

kent.

— S’il est deux hommes que la fortune peut se vanter d’avoir aimés et haïs, — l’un et l’autre se regardent.