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LE ROI LEAR.

edgar.

Eh bien, hier au soir.

edmond.

Lui avez-vous parlé ?

edgar.

Oui, deux heures durant.

edmond.

Vous êtes-vous séparés en bons termes ? Ne vous a-t-il manifesté aucun déplaisir, soit dans ses paroles, soit dans sa contenance ?

edgar.

Aucun.

edmond.

Demandez-vous en quoi vous pouvez l’avoir offensé ; et, je vous en supplie, évitez sa présence jusqu’à ce que la vivacité de son déplaisir ait eu le temps de s’apaiser. En ce moment il est à ce point exaspéré que la destruction de votre personne pourrait à peine le calmer.

edgar.

Quelque scélérat m’aura fait tort auprès de lui.

edmond.

C’est ce que je crains. Je vous en prie, gardez une patiente réserve, jusqu’à ce que la violence de sa rage se soit modérée ; écoutez, retirez-vous chez moi, dans mon logement ; de là je vous mettrai à même d’entendre parler milord. Allez, je vous prie ; voici ma clef. Pour peu que vous vous hasardiez dehors, marchez armé.

edgar.

Armé, frère (28) ?

edmond.

Frère, je vous conseille pour le mieux ; je ne suis pas un honnête homme, s’il est vrai qu’on vous veuille du bien. Je ne vous ai dit que très-faiblement ce que j’ai vu