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SCÈNE XII.

ploierez ainsi, moi, j’irai sarcler — les herbes nuisibles qui, sans profit, absorbent — aux dépens des fleurs saines la fécondité du sol.

premier garçon.

— Pourquoi dans cet enclos — maintenir la loi, l’ordre, la juste harmonie, — et y faire voir le modèle d’un État régulier, — quand notre pays tout entier, ce jardin muré par la mer, — est plein de mauvaises herbes, voit ses plus belles fleurs étouffées, — tous ses arbres fruitiers incultes, ses haies ruinées, — ses parterres en désordre, et ses plantes salutaires — en proie aux chenilles ?

le jardinier.

Tais-toi… — Celui qui a souffert ce printemps désordonné — est lui-même arrivé à la chute des feuilles. — Les mauvaises herbes, qu’abritait son large feuillage, et qui le dévoraient en paraissant le soutenir, — ont été arrachées et complètement déracinées par Bolingbroke. — Je veux parler du comte de Wiltshire, de Bushy et de Green.

premier garçon.

— Comment ! est-ce qu’ils sont morts ?

le jardinier.

Ils sont morts ; et Bolingbroke — a saisi le roi dissipateur… Oh ! quel dommage — qu’il n’ait pas soigné et cultivé ses domaines — comme nous ce jardin ! Nous, la saison venue, — nous incisons l’écorce, cette peau de nos arbres fruitiers, — de peur que regorgeant de sève et de sang, — ils ne se perdent par excès de richesses. — S’il en avait fait autant aux grands et aux ambitieux, — ils auraient pu vivre pour porter, et lui pour recueillir — les fruits du devoir. — Toutes les branches superflues, — nous les élaguons pour faire vivre les rameaux producteurs. — S’il en avait fait autant, lui-même porterait