Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 11.djvu/110

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
106
RICHARD II.

— est là où tu vas et non là d’où tu viens. — Prends les oiseaux qui chantent pour des musiciens, — le gazon que tu foules pour la natte d’un salon, — les fleurs, pour de belles dames, et ta marche — pour la mesure délicieuse d’une danse. — Car le chagrin hargneux a moins de pouvoir pour mordre — l’homme qui le nargue et le traite légèrement (6).

bolingbroke.

— Oh ! qui peut tenir un tison dans sa main, — en songeant aux glaces du Caucase ? — ou émousser l’aiguillon d’un appétit famélique — par la seule idée d’un festin imaginaire ? — ou se rouler nu dans la neige de décembre, — en songeant à la chaleur d’un été fantastique ? — Oh ! non, la pensée du bien — ne rend que plus vif le sentiment du mal. — La dent cruelle de la douleur n’est jamais plus venimeuse — que quand elle mord sans ouvrir la plaie.

jean de gand.

— Viens, viens, mon fils ; je vais te mettre dans ton chemin. — Si j’étais jeune comme toi, et dans ta situation, je ne voudrais pas rester.

bolingbroke.

— Adieu donc, sol de l’Angleterre ; adieu, terre chérie, — ma mère, ma nourrice, qui me portes encore ! — En quelque lieu que j’erre, je pourrai toujours me vanter — d’être, quoique banni, un véritable Anglais.

Tous sortent.