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LA SAUVAGE APPRIVOISÉE.
frappe-moi ici, cogne-moi bien et cogne-moi solidement ? — Et maintenant vous venez prétendre qu’il s’agissait de cogner à la porte !
PETRUCHIO.

— Drôle, va-t’en ou tais-toi, je te le conseille.

HORTENSIO.

— Patience, Petruchio ; je suis la caution de Grumio. — Vraiment voilà une altercation bien déplorable entre vous et lui, — votre ancien, votre fidèle et plaisant serviteur Grumio. — Mais dites-moi, mon doux ami, quelle est l’heureuse brise — qui vous a entraîné de l’antique Vérone à Padoue ?

PETRUCHIO.

— Le vent qui disperse les jeunes gens à travers le monde — et les envoie chercher fortune hors du pays natal — où ne s’acquiert que peu d’expérience. En peu de mots, — signor Hortensio, voici ma situation : — Antonio, mon père, est mort ; et je suis lancé dans les errements de la vie — pour tâcher de me marier et de prospérer de mon mieux. — J’ai des écus dans ma bourse, un patrimoine dans mon pays, — et je me suis mis en voyage pour voir le monde.

HORTENSIO.

— Petruchio, veux-tu que je te parle sans détour ? — Je puis te présenter à une femme acariâtre et désagréable. — Tu ne me remercieras guère de mon offre, — et pourtant je te promets qu’elle sera riche — et très-riche ; mais tu es trop mon ami — pour que je souhaite te la voir épouser.

PETRUCHIO.

— Signor Hortensio, entre des amis tels que nous, — quelques mots suffisent ; si donc tu connais — une personne assez riche pour être la femme de Petruchio, — comme l’argent est le refrain de ma chanson matrimo-