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PEINES D'AMOUR PERDUES.

LE ROI, s’avançant vers Longueville.

— Allons, monsieur, rougissez ! Vous êtes dans le même cas que lui ; — en le grondant vous vous rendez deux fois plus coupable. — Non, vous n’aimez pas Maria ! Longueville n’a jamais composé de sonnet à sa louange ! — Jamais il n’a croisé ses bras sur — sa poitrine, pour comprimer les élans amoureux de son cœur ! — Tout à l’heure, enfoui secrètement dans ce taillis, — je vous ai observés et j’ai rougi pour vous deux. — J’ai entendu vos rimes coupables, remarqué votre contenance ; — j’ai vu les soupirs s’exhaler de vous, et trop bien noté vos transports. — Hélas ! disait l’un ! Ô Jupiter, criait l’autre ! — L’un vantait des cheveux d’or, l’autre des yeux de cristal.

À Longueville.

— Vous étiez prêt pour le paradis à violer votre foi et vos vœux !

À du Maine.

— Et Jupiter, pour votre bien-aimée, enfreindrait un serment ! Que dira Biron en apprenant — que vous avez faussé la foi, jurée avec tant de ferveur ! — Comme il va vous railler ! Quelle dépense d’esprit il va faire ! — Comme il va triompher, sauter d’aise et rire ! — Pour tous les trésors que j’ai jamais vus, — je ne voudrais pas qu’il en sût autant sur mon cœur.

BIRON.

— Montrons-nous maintenant pour flageller l’hypocrisie.

Il descend de l’arbre et s’adresse au roi.

— Ah ! mon cher suzerain, pardon ! — Avez-vous bonne grâce à reprocher — leur amour à ces vermisseaux, vous, tendre cœur, qui êtes le plus amoureux de tous ! — Vos larmes ne sont-elles pas autant de chars — où apparaît toute brillante certaine princesse ? — Vous