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LA SAUVAGE APPRIVOISÉE.

CATHARINA.

— Tout l’affront est pour moi. Pardieu, l’on me force, — en dépit de mon cœur, à donner ma main — à un écervelé, à un malotru, à un excentrique — qui, après avoir fait sa cour à la hâte, prend toutes ses aises pour épouser ! — Je vous avais bien dit que c’était un fou, un frénétique, — qui cachait une amère raillerie sous une apparence de rude franchise. — Afin de passer pour un plaisant personnage, — il ferait la cour à mille femmes, fixerait à chacune le jour de son mariage avec elle, — inviterait des amis et ferait même publier les bans, — sans avoir jamais la moindre intention d’épouser. — Ainsi, désormais, le monde montrera au doigt la pauvre Catherine, — et dira : « Tenez, voilà la femme de ce fou de Petruchio, — pour le jour où il lui plaira de venir l’épouser ! »

TRANIO.

— Patience, bonne Catharina, patience, Baptista. — Sur ma vie, Petruchio n’a que de bonnes intentions, — quel que soit le hasard qui l’empêche de tenir parole. — Tout brusque qu’il est, je le sais parfaitement sensé ; — tout jovial qu’il est, il n’en est pas moins honnête homme.

CATHARINA.

— Plût au ciel que Catharina ne l’eût jamais connu !

Elle sort en pleurant, suivie de Bianca et des gens de la noce.
BAPTISTA.

— Va, ma fille, je ne puis te blâmer de pleurer ; — car une pareille injure vexerait une sainte, — à plus forte raison une fille emportée et impatiente comme toi. —

Biondello arrive en courant.
BIONDELLO.

Maître ! maître ! une nouvelle ! une vieille nouvelle ! Une nouvelle comme vous n’en avez jamais entendu ?