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ROMÉO ET JULIETTE.

MERCUTIO.

— Tout homme qui sait écrire peut répondre à une lettre. —

BENVOLIO.

C’est à l’auteur de la lettre qu’il répondra : provocation pour provocation.

MERCUTIO.

Hélas ! pauvre Roméo ! il est déjà mort : poignardé par l’œil noir d’une blanche donzelle, frappé à l’oreille par un chant d’amour, atteint au beau milieu du cœur par la flèche de l’aveugle archerot… Est-ce là un homme en état de tenir tête à Tybalt ?

BENVOLIO.

Eh ! qu’est-ce donc que ce Tybalt ?

MERCUTIO.

Plutôt le prince des tigres que des chats, je puis vous le dire (80). Oh ! il est le courageux capitaine du point d’honneur. Il se bat comme vous modulez un air, observe les temps, la mesure et les règles, allonge piano, une, deux, trois, et vous touche en pleine poitrine. C’est un pourfendeur de boutons de soie, un duelliste, un duelliste, un gentilhomme de première salle, qui ferraille pour la première cause venue.

Il se met en garde et se fend.

Oh ! la botte immortelle ! la riposte en tierce ! touché !

BENVOLIO.

Quoi donc ?

MERCUTIO

Au diable ces merveilleux grotesques avec leur zézaiement, et leur affectation, et leur nouvel accent !

Changeant de voix.

Jésus ! la bonne lame ! le bel homme ! l’excellente putain ! Ah ! mon grand-père, n’est-ce pas chose lamentable que nous soyons ainsi harcelés par ces moustiques étrangers,