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OTHELLO.

OTHELLO.

Je la mettrai toute en pièces !

IAGO.

— Non, soyez calme. Nous ne voyons encore rien de fait : — elle peut être honnête encore. Dites-moi seulement, — avez-vous quelquefois vu un mouchoir — brodé de fraises aux mains de votre femme ?

OTHELLO.

— Je lui en ai donné un comme tu dis ; ç’a été mon premier présent.

IAGO.

— Je ne le savais pas. C’est avec un mouchoir pareil — (il est à votre femme, j’en suis sûr) que j’ai aujourd’hui — vu Cassio s’essuyer la barbe.

OTHELLO.

Si c’est celui-là !…

IAGO.

— Que ce soit celui-là ou un autre, s’il lui appartient, c’est une nouvelle preuve qui parle contre elle.

OTHELLO.

— Oh ! si ce gueux du moins avait quarante mille vies ! — Une seule est trop misérable, trop chétive pour ma vengeance ! — Je le vois maintenant : c’est vrai !… Écoute, Iago, — tout mon fol amour, je le souffle comme ceci à la face du ciel : — il a disparu. Émerge, noire vengeance, du fond de ton enfer ! — Cède, ô amour, la couronne et le trône de ce cœur — à la tyrannique haine ! Gonfle-toi, mon sein : car ce que tu renfermes — n’est que langues d’aspics !

IAGO.

Je vous en prie, calmez-vous.

OTHELLO.

— Oh ! du sang ! du sang ! du sang !