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SCÈNE XX.
sang royal s’échauffe, les voilà aussi violents que la rude rafale, — qui prend par la cime le pin de la montagne, — et le fait plier jusqu’à la vallée. Chose merveilleuse, — qu’un invisible instinct leur ait appris — cette majesté sans leçon, cette dignité sans enseignement, — cette urbanité sans exemple, et cette valeur — qui germe en eux sauvage, mais qui fait moisson, — comme si elle avait été semée !… Pourtant je me demande toujours — ce que nous présage la présence de Cloten ici, — et ce que nous amènera sa mort.
Guidérius revient.
GUIDÉRIUS.

Où est mon frère ? — J’ai envoyé la caboche de Cloten, dans le torrent, — en ambassade à sa mère ; jusqu’à son retour, — je garde son corps en otage.

Une fanfare solennelle et plaintive se fait entendre et semble sortir de la caverne.
BÉLARIUS.

Qu’entends-je ? mon instrument de signal ! — Écoute, Polydore !… Mais pour quel motif — Cadwal le fait-il résonner ? Écoute !

GUIDÉRIUS.

— Est-ce qu’il est chez nous ?

BÉLARIUS.

Il vient justement de rentrer.

GUIDÉRIUS.

— Que veut-il dire ? Depuis la mort de ma mère bien-aimée — ce son n’avait pas retenti. Les choses solennelles — ne conviennent qu’aux cas solennels. Qu’y a-t-il donc ? Les joies sans motif ou les lamentations sans cause — sont des gaietés de singe ou des chagrins d’enfant. — Cadwal est-il fou ?