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SCÈNE V.
seul — qui doit faire pour nous la justice d’un acte, — et que nous ne devons pas abattre le courage de nos âmes — parce que Cassandre est folle. Les transports de son délire — ne peuvent gâter la bonté d’une cause — que nous sommes tous engagés d’honneur — à rendre sacrée. Pour moi, — je n’y ai pas plus d’intérêt que tous les fils de Priam ; — et à Jupiter ne plaise qu’il soit pris entre nous — aucune décision que le plus faible scrupule répugne — à défendre et à soutenir !
PÂRIS.

— Autrement, le monde pourrait accuser de légèreté — mes entreprises aussi bien que vos conseils. — Mais, j’en atteste les dieux, c’est votre consentement unanime — qui a donné des ailes à mon inclination et tranché — toutes les craintes attachées à un si terrible projet. — Car que pouvait, hélas ! mon bras isolé ? — Quelle résistance y avait-il dans la valeur d’un seul homme, — pour soutenir le choc et la furie de ceux — que devait armer cette querelle ? Pourtant, je le déclare, — fussé-je seul à affronter tous les périls, — si j’avais une puissance aussi ample que ma volonté, — jamais Pâris ne rétracterait ce qu’il a fait, — jamais il ne se relâcherait dans sa résolution.

PRIAM.

Pâris, vous parlez — comme un homme affolé de ses jouissances. — À vous le miel toujours, mais aux autres le fiel. — La vaillance, à ce prix, n’a rien de méritoire.

PÂRIS.

Seigneur, je ne songe pas uniquement — aux plaisirs qu’une telle beauté apporte avec elle. — Mais je voudrais effacer la tache de son enlèvement — en ayant l’honneur de la garder. — Quelle trahison ce serait envers cette reine conquise, — quelle disgrâce pour votre dignité, quelle honte pour moi, — de la restituer au-