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mâles du roi Édouard III, que nous autres de la maison d’York ! » Et ce meurtre fut commis sans l’assentiment du roi Édouard IV, qui aurait désigné pour ce métier de boucher tout autre que son propre frère. Des hommes sages insinuent aussi qu’il servit ses desseins en contribuant à la mort de son propre frère Clarence, et que, bien qu’il y résistât en apparence, il la désira intérieurement. Ceux qui ont observé ses actes et sa conduite donnent ici pour raison que, longtemps avant la fin du règne d’Édouard, Richard songeait à obtenir la couronne, dans le cas probable où son frère, dont la vie devait être abrégée par un régime funeste, laisserait en mourant ses enfants en bas âge, ainsi que cela arriva. Alors, si le duc de Clarence avait vécu, le plan projeté par Richard eût été grandement empêché ; car, soit que le duc de Clarence fût resté fidèle à son neveu le jeune roi, soit qu’il eût pris la royauté pour lui-même, le duc de Glocester aurait eu toutes les cartes contre lui. Mais, une fois son frère Clarence mort, il savait bien qu’il pouvait jouer à coup sûr. Il n’y a pas de certitude sur tous ces points, et quiconque devine ou conjecture peut aussi bien tirer trop loin que trop près. Toutefois cette grave conjecture se réalisa plus tard. »

Ainsi l’historien n’accuse pas formellement Richard d’avoir causé la perte de son frère Georges ; il le soupçonne seulement de l’avoir voulue. Cet avertissement donné, Thomas Morus raconte dans quelles circonstances et par quels moyens eut lieu la mort du duc de Clarence :

« Dans la septième année du règne d’Édouard, il tomba une étincelle de malice privée entre le roi et son frère Clarence. Avait-elle jailli des vieilles rancunes d’une époque passée, ou d’un feu nouvellement allumé par la