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ments de Charles XII périrent jusqu’au dernier homme en essayant de traverser les Alpes scandinaves par la route même que Jacques avait suivie. Enfin, le couple royal parvint le 21 janvier 1590 au château de Kronenberg, où il fut reçu par le nouveau roi Christian IV, entouré de son conseil de régence[1]. Il resta tout l’hiver dans le palais danois et ne revint en Écosse que le 1er mai, après une traversée de neuf jours, qui fut troublée, cette fois encore, par un effroyable coup de vent, suprême effort des éléments conjurés.

Un Te Deum fut chanté dans toutes les églises pour célébrer le retour providentiel de Jacques VI. Mais il fallait une satisfaction à la vindicte publique. Tous les périls qui avaient menacé les jours du roi et de la reine n’étaient pas naturels, évidemment. Ils étaient le résultat d’un vaste complot qui avait pour but d’empêcher une union si fatale aux intérêts de Satan. La variété des moyens employés prouvait la science infernale des conspirateurs : ces trois tempêtes successives qui avaient rejeté la flotte danoise sur la côte norwégienne, cette rafale qui avait fait chavirer la barque de lady Melville, ce brouillard si épais qui avait enveloppé pendant trente heures le sloop de Jacques VI, ce froid précoce qui avait retenu l’escadre dans la baie d’Upslo, ces avalanches qui avaient failli écraser les augustes voyageurs dans les Alpes scandinaves, enfin, ce coup de vent qui avait manqué de les engloutir au retour, autant de manœuvres criminelles qui ne pouvaient rester impunies.

Une instruction fut immédiatement commencée pour découvrir les coupables, et les soupçons les plus graves

  1. Deux des membres de ce conseil s’appelaient, l’un, Rosencrantz, l’autre, Guildenstern : ce sont les mêmes noms que Shakespeare a donnés aux deux courtisans chargés d’espionner Hamlet. Tous les détails de ce curieux voyage étaient sans aucun doute familiers au poëte anglais.