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raine, ni à ses ministres, (quant à sa mère captive, il s’en souciait peu), hésitait entre madame de Navarre et madame de Danemark. Il tergiversa ainsi pendant trois ans. À la fin, cependant, il comprit la nécessité d’assurer par une conclusion le bonheur de son peuple. Il prit dans sa main le portrait de madame de Navarre, que lui avait remis le poëte ambassadeur Dubartas, et dans l’autre, la miniature de madame de Danemark, que lui avaient présentée les envoyés du roi Frédéric. Puis il compara. La princesse de Navarre n’était pas jolie, et, malgré les flatteries du peintre, elle paraissait bien son âge : trente-six ans. La princesse de Danemark était ravissante : un teint exquis, des cheveux blonds, des yeux noirs, une petite bouche en cœur, un front de seize ans !

Jacques n’hésita plus. Il choisit la princesse de Danemark. Il expliqua son choix à ses ministres par les considérations les plus politiques. L’alliance avec Henri de Navarre n’avait rien d’avantageux. Henri n’avait pas le sou, et, s’il avait des droits au trône de France, il lui restait à les faire valoir. L’alliance avec le Danemark était bien préférable : le roi Frédéric était riche, et il donnait à sa fille une dot magnifique, les Orcades, les Shetland, si nécessaires à l’unité de l’Écosse.

Une seule crainte restait à Jacques, c’était de fâcher tout de bon Élisabeth, qui venait de faire décapiter sa mère, mais qui lui accordait une pension absolument nécessaire à l’entretien de sa maison. Pour amadouer sa marraine, Jacques trouva un moyen qu’il crut fort ingénieux. Il fit faire une bonne petite émeute par son peuple d’Édimbourg, qui ne demandait pas mieux, et qui, au nom du salut public, réclama son mariage, le mousquet et la pique à la main. À cette mise en demeure, le malheureux roi ne pouvait faire autrement que de céder. Il déclara à son peuple qu’il consentait à congédier ce cher