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en fait toute sa joie. — Chaque fois maintenant qu’ils se rencontrent, au bois, sur le gazon, — près d’une limpide fontaine, à la clarté du ciel étoilé, — le roi et la reine se querellent : si bien que tous leurs sylphes effrayés — se fourrent dans la coupe des glands et s’y cachent.
LA FÉE.

— Ou je me trompe bien sur votre forme et vos façons, — ou vous êtes cet esprit malicieux et coquin — qu’on nomme Robin Bonenfant (5). N’êtes-vous pas celui — qui effraie les filles du village, — écrème le lait, tantôt dérange le moulin, — et fait que la ménagère s’essouffle vainement à la baratte, — tantôt empêche la boisson de fermenter, — et égare la nuit les voyageurs, en riant de leur peine ? — Ceux qui vous appellent Hobgoblin et charmant Puck, — vous faites leur ouvrage, et vous leur portez bonheur. — N’êtes-vous pas celui-là ?

PUCK.

Tu dis vrai ; — je suis ce joyeux rôdeur de nuit. — J’amuse Obéron (6), et je le fais sourire — quand je trompe un cheval gras et nourri de fèves, — en hennissant comme une pouliche coquette. — Parfois je me tapis dans la tasse d’une commère — sous la forme exacte d’une pomme cuite ; — et, lorsqu’elle boit, je me heurte contre ses lèvres, — et je répands l’ale sur son fanon flétri. — La matrone la plus sage, contant le conte le plus grave, — me prend parfois pour un escabeau à trois pieds ; — alors je glisse sous son derrière ; elle tombe, — assise comme un tailleur, et est prise d’une quinte de toux ; — et alors toute l’assemblée de se tenir les côtes et de rire, — et de pouffer de joie, et d’éternuer, et de jurer — que jamais on n’a passé de plus gais moments. — Mais, place, fée ! voici Obéron qui vient.

LA FÉE.

Et voici ma maîtresse. Que n’est-il parti !