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NOTICE
SUR
BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN


L’histoire de Cinévra, dans le cinquième chant de l’Arioste, a quelque rapport avec la fiction romanesque de cette pièce ; plusieurs critiques, et entre autres Pope, ont cru que le Roland Furieux avait été la source où Shakspeare avait puisé. On remarque aussi dans plusieurs anciens romans de chevalerie des épisodes qui rappellent la calomnie de don Juan, et la mort supposée d’Héro ; mais c’est dans les histoires tragiques que Belleforest a empruntées à Bandello qu’on trouve la nouvelle qui a évidemment fourni à Shakspeare l’idée de Beaucoup de bruit pour rien.

« Pendant que Pierre d’Aragon tenait sa cour à Messine, un certain baron, Timbrée de Cardone, favori du prince, devint amoureux de Fénicia, fille de Léonato, gentilhomme de la ville : sa fortune, la faveur du roi, et ses qualités personnelles plaidèrent si bien sa cause, que Timbrée fut en peu de temps l’amant préféré de Fénicia, et obtint l’agrément de Léonato pour l’épouser.

« La nouvelle en vint aux oreilles d’un jeune gentilhomme appelé Girondo-Olerio-Valentiano, qui depuis longtemps cherchait vainement à faire impression sur le cœur de Fénicia. Jaloux du bonheur de Timbrée, il ne songe plus qu’à le traverser, et met dans ses intérêts un autre jeune homme qui, affectant pour Timbrée un zèle officieux, va le prévenir qu’un de ses amis faisait de fréquentes visites nocturnes à sa fiancée, et offre de lui donner le soir même les preuves de sa perfidie.

« Timbrée accepte ; il suit son guide qui lui fait voir en effet son prétendu rival qui n’était qu’un valet travesti, montant par une échelle de corde dans l’appartement de Fénicia. Timbrée ne veut pas