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d’ici. Il est permis de commettre le vol, de se dérober soi-même, quand il ne reste plus d’espérance.

(Ils sortent.)


Scène IV

Les dehors du château.

ROSSE conversant avec UN VIEILLARD.

LE VIEILLARD. — Je me souviens bien de soixante-dix années, et dans ce long espace de temps j’ai vu de terribles moments et d’étranges choses ; mais tout ce que j’avais vu n’était rien auprès de cette cruelle nuit.

ROSSE. — Ah ! bon père, tu vois comme le ciel, troublé par une action de l’homme, en menace le sanglant théâtre. D’après l’horloge il devrait faire jour, et cependant une nuit sombre étouffe le flambeau voyageur. La nuit triomphe-t-elle ? ou bien est-ce le jour, honteux de se montrer, qui laisse les ténèbres ensevelir la face de la terre, lorsqu’une vivante lumière devrait la caresser ?

LE VIEILLARD. — Cela est contre nature, comme l’action qui a été commise. Mardi dernier, on a vu un faucon qui s’élevait, fier de sa supériorité, saisi au vol et tué par un hibou preneur de souris.

ROSSE. — Et les chevaux de Duncan (chose très-étrange, mais certaine), qui étaient si beaux, si légers, les plus estimés de leur race, sont tout à coup redevenus sauvages, ont brisé leurs râteliers, se sont échappés, se révoltant contre toute obéissance, comme s’ils eussent voulu entrer en guerre avec l’homme.

LE VIEILLARD. — On dit qu’ils se sont mangés l’un l’autre.

ROSSE. — Rien n’est plus vrai, au grand étonnement de mes yeux qui en ont été témoins. (Macduff paraît.) Voici l’honnête Macduff.—Eh bien ! monsieur, comment va le monde maintenant ?

MACDUFF. — Quoi ! ne le voyez-vous pas ?

ROSSE. — A-t-on découvert qui a commis cette action plus que sanguinaire ?

MACDUFF. — Ceux que Macbeth a tués.