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SCÈNE VIII.

sir christophe.

— Du vin ! je vais répondre au cardinal Wolsey. — Milord, nous autres Anglais, nous avons l’âme plus généreuse — que les Espagnols, ces meurt-de-faim de mauvaise mine. — En Espagne, ceux qui sont riches se serrent le ventre — pour se couvrir le dos du capuchon italien — et des soieries de Séville ; et le plus pauvre diable, — qui là se nourrit de limon et de sardine et ne s’est jamais réchauffé le palais — avec de la viande fraîche, portera une enveloppe — plus grasse et plus gaillarde que sa face famélique. — La vanité, l’inquisition et le jeûne, — voilà, selon moi, le démon à trois têtes de l’Espagne.

sir thomas morus.

— Voilà bien le triple fléau de cette nation, — qui se traîne à la suite des autres dans une aveugle imitation.

sir christophe.

— Milords, en guise de bienvenue, je porte un toast solennel à la santé de vos seigneuries.

sir thomas morus.

— J’aime fort la santé, mais quand les santés — donnent le mal de tête et l’indigestion, alors j’arrête les santés.

À Cromwell qui lui verse à boire.

— Non, ne verse pas, ami ! Car, toutes petites que sont ces gouttes, — elles sont de force à cogner un homme contre un mur.

LE CARDINAL, montrant Cromwell.

— Sir Christophe, cet homme est-il à vous ?

sir christophe.

— Oui, et n’en déplaise à votre grâce, c’est un savant, un linguiste, — un garçon qui a vu une grande partie de la chrétienté, milord.

le cardinal.

— Approchez, l’ami ! vous avez donc voyagé ?