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SCÈNE IV.

dégradent faute d’usage ; — ces palais qui, il y a deux étés à peine, — avaient besoin de tous les raffinements pour flatter le goût, — seraient maintenant satisfaits d’un morceau de pain ; et le mendient — Ces mères qui, pour gorger leurs enfants, — ne trouvaient rien de trop exquis ; sont maintenant prêtes — à manger les chers petits qu’elles aimaient tant. — Si aiguës sont les dents de la faim, que mari et femme — tirent au sort à qui mourra le premier pour allonger la vie de l’autre ; — ici pleure un seigneur, là une dame ; — beaucoup succombent, mais ceux qui les voient périr, — ont à peine assez de force pour leur donner la sépulture. — N’est-il pas vrai ?

dionysa.

— Nos joues et nos yeux caves l’attestent.

cléon.

— Oh ! puissent les cités — qui à la coupe prospère de l’Abondance boivent si largement — entendre nos sanglots dans l’orgie de leur superflu ! — La misère de Tharse pourrait bien être la leur.

Entre un seigneur.
le seigneur.

— Où est le seigneur gouverneur ?

cléon.

Le voici. — Proclame les malheurs que tu apportes avec tant de hâte ; — car le secours est trop loin de nous pour que nous puissions l’attendre.

le seigneur.

— Nous avons signalé, sur la côte voisine, — une imposante flottille faisant voile sur notre ville.

cléon.

Je m’en doutais. — Un malheur n’arrive jamais sans amener un héritier — qui puisse lui succéder. — Ainsi du