— Volontiers, répond Mme Daliot.
— Puis-je vous être utile à quelque chose ? demande l’archiviste.
— Vous, non. Un homme !… Mais les petites, parfaitement, comme leur mère, et je ne les consulte même pas.
Liette se penche à l’oreille de sa sœur.
— Crois-tu ?… Gageons que c’est pour nous faire rincer ses tasses !
— Sotte ! dit Nise. Des tasses pour des soldats ! Les Anglais ne sont pas des Français. Et ils ont une telle habitude du confort !
— Chez eux peut-être. En campagne, c’est différent, et je présume que leur « quart » doit leur suffire. Et puis, quand on devrait mettre la main à la pâte, te croirais-tu déshonorée, Liette ?
Liette proteste pour la forme :
— Pas le moins du monde. À la Croix-Rouge, il n’est pas de vile besogne, tu sais. Ce qui m’effraie, c’est une relégation dans le fond de leur cantine…
— Vous venez, mes petites ? hèle l’amie de Mme Daliot.
— Oui, madame, crie Liette sans grand enthousiasme.
Elle retient Nise qui va pour s’élancer.
— Ne t’emballe donc pas ! Je te disais… Ah ! oui, voilà… Ce que je crains, c’est d’être laissée à l’arrière, alors que je suis faite pour le front. Quand on a des armes, on doit s’en servir. Or, nous parlons anglais, nous. Nous pouvons briller comme interprètes. Good evening, sir !… How do you do ? A cup of tea ? [1]
— Folle ! dit Nise en riant malgré elle.
Les larmes aux yeux à force de rire aussi, Liette enfin se laisse entraîner vers l’annexe du buffet, aménagée en cantine et où Mme Daliot s’occupe déjà.
- ↑ Bonsoir, monsieur ! Comment allez-vous ? Une tasse de thé ?