Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/652

Cette page n’a pas encore été corrigée

ne dois pas vous offrir moins que ce que je vous offre. Cependant le Roy d’Armenie ayant connu par les acclamations de tout le monde qu’il avoit bien entendu, commença de teſmoigner ſa reconnoiſſance à Cyrus : qui pour luy faire voir qu’il eſtoit libre, commença auſſi de traitter toutes ces Princeſſes avec une civilité extréme : ordonnant qu’on leur fiſt venir des Chariots pour les conduire à Artaxate. Seigneur, luy dit le Roy d’Armenie, apres ce que vous venez de faire, je ne veux plus ſimplement eſtre Vaſſal, & je veux devenir Sujet : mais Sujet ſi fidelle, que vous pourrez non ſeulement diſposer de tous mes Threſors, qui ſont ſur le haut de ces Montagnes, mais de ma liberté & de ma vie. Cyrus reſpondit au diſcours de ce Prince fort genereuſement : & l’aſſura que Ciaxare ne vouloit autre choſe de luy, ſinon qu’il demeuraſt dans les meſmes termes où ſes Peres avoient veſcu : & qu’il joigniſt ſes Troupes aux ſiennes. Nous les conduirons Seigneur, reſpondirent tout d’une voix Tigrane & Phraarte, & nous mourrons pour voſtre ſervice aveque joye, ſi l’occaſion s’en preſente.

Cyrus repartit encore tres civilement à ces deux Princes : & les Chariots eſtant arrivez, la Reine d’Armenie & les Princeſſes ſes Filles furent conduites à Artaxate, dans le meſme Palais où eſtoit la Princeſſe Araminte : à cauſe qu’il eſtoit moins occupé que celuy où eſtoit logé Ciaxare. Ainſi celle qui avoit eſté priſonniere en Armenie, reçeut la Reine d’Armenie comme ſi elle euſt eſté dans les Eſtats du Roy ſon Frere : car Cyrus envoya Chriſante donner ordre à cette entreveuë, qui ſe paſſa avec beaucoup de civilité de part & d’autre : & d’autant plus que le Prince Tigrane & Phraarte, accompagnerent